" Il reste très peu de juifs à Iasi ", affirme Olga Chimir, qui est depuis 26 ans l’administrateur du cimetière. Elle ajoute que sur la colline de Pacuret on trouve pas moins de 200.000 sépultures de personnes juives, occupant une superficie de 23 hectares. Il n’y a pas de documents attestant avec précision le nombre de tombes qui existent dans le cimetière. Selon les chefs de la communauté juive de Iasi, il y en aurait 100.000, alors que certains ouvrages parlent de 140.000.
Olga Chimir raconte qu’en 1981, lorsqu’elle s’est fait embaucher au cimetière, les enterrements se succédaient beaucoup plus souvent, car la communauté de Iasi était encore assez nombreuse. Après 1989 le Cimetière juif de Iasi, qui était l’un des plus grands d’Europe de l’Est, est resté uniquement un lieu de pèlerinage pour les juifs d’Europe qui ont des membres de leurs familles enterrés ici. Nombreuses sont les stèles funéraires qui peuvent être considérées comme des objets d’art. Les plaques funéraires s’appellent "matevot" , chacune d’entre elles portant l’étoile juive à six angles. Les premiers tombeaux sont apparus dans ces lieux dès 1880, année où la communauté juive a acheté le terrain. Sur la majorité des tombes on ne peut plus voir les inscriptions originales, effacées par le temps. L’un des plus beaux tombeaux et l’un des mieux conservés depuis plus de cent ans, est celui appartenant au docteur Bernhard Taussic, un personnage aimé à Iasi, surnommé "le médecin des pauvres". Beaucoup de gens ont assisté à ses funérailles en 1896, et beaucoup d’entre eux étaient des chrétiens orthodoxes. L’une des parcelles du cimetière est réservée aux juifs qui sont morts pendant la première guerre mondiale. Elle comporte 217 tombeaux, datant de la période 1917-1918. Entre les deux guerres, vivaient encore à Iasi 45.000 juifs, ce qui représentait la moitié de la population de la ville. La communauté vivait alors aux alentours des rues Palat ou Podu Ros. De nos jours, à cet endroit, se trouvent des bâtiments administratifs ou privés. Le peu de juifs qui vivent toujours à Iasi se réunissent une fois par semaine à la synagogue de Targu Cucu. Jadis à Iasi, il y avait 123 synagogues ou des maisons de prières pour les juifs. "La synagogue de Târgu Cucu est la seule qui ait survécu. C’est la plus ancienne synagogue de Iasi", dit Pincu Kaiserman, président de la Communauté juive de la ville de Iasi.
La communauté juive de la ville de Iasi compte de nos jours environ 500 personnes. Ils sont pour la plus part âgés (souvent plus de 70 ans), certains ayant survécu à l’Holocauste. Ceux qui sont encore en vie essaient de garder très vive dans leur mémoire une époque déjà révolue. A l’évocation du Pogrom, des trains de la mort, des bombardements de la guerre, la voix devient hésitante lorsqu’ils parlent, et le fil de leur histoire est brusquement coupé par un triste sourire.
[source : Evenimentul zilei]